INFO DU PARISIEN 28.02.2022

Les organisateurs de "la tribune des militaires" prévoient une marche à Paris le 26 mars.
INFO LE PARISIEN . À quinze jours du premier tour de la présidentielle, les meneurs du défilé poseront dix questions aux candidats à l’Élysée. La préfecture de Paris n’a pas encore dit si elle autoriserait la manifestation.
La «marche de la fierté française» devrait se dérouler entre Denfert-Rochereau et les Invalides à Paris… si la préfecture l’autorise.. LP/Arnaud Journois Par Henri Vernet Le 28 février 2022 à 15h17 Les promoteurs de la fameuse lettre des généraux, qui avait soulevé une forte polémique il y a près d’un an en dénonçant avec des accents factieux un « délitement » du pays et appelant à « l’intervention » de l’armée pour la « protection des valeurs civilisationnelles », comptent refaire parler d’eux. Pas sous forme épistolaire, cette fois, mais en défilant dans Paris le 26 mars pour une « marche de la fierté française ». Elle se déroulera entre Denfert-Rochereau et les Invalides… si la préfecture l’autorise. Cette dernière, déjà avertie, a indiqué qu’elle se prononcera dans les quinze jours précédant l’évènement. Sujet sensible. Après la tribune, en effet, le ministère des Armées avait fustigé un texte « au ton accusatoire, outrancier et polémique (…) engageant l’image des armées », puis déclenché une procédure disciplinaire à l’encontre des généraux en 2e section (à la retraite mais toujours liés à l’institution, donc astreints au devoir de réserve) et de la poignée de militaires d’active impliqués. La date du 26 mars ne doit rien au hasard. À quinze jours du premier tour de la présidentielle, les meneurs du défilé poseront dix questions aux candidats à l’Élysée. La première étant : « Êtes-vous d’accord pour qu’il soit impossible de s’engager dans l’Armée française si l’on a la double nationalité ? » Surtout, la marche tombera une semaine après la célébration du 60e anniversaire des accords d’Evian marquant la fin de la guerre d’Algérie. « Comment peut-on fêter une défaite, non pas militaire mais politique, avec ces accords que le FLN algérien n’a jamais respectés ! » s’énerve Jean-Pierre Fabre-Bernadac, principal organisateur du défilé. Ce septuagénaire ancien capitaine de gendarmerie, qui officia à la tête du service d’ordre du FN dans les années 1990, était déjà à la manœuvre pour la tribune publiée par Valeurs actuelles, qui recueillit plusieurs milliers de signatures. « Eux, c’est le délitement, la déconstruction, nous, nous voulons reconstruire » Dans le collimateur, les « politiques qui décident de la guerre », actuels et passés, et dont les « revirements, de l’Indochine et l’Algérie jusqu’au Mali en passant par l’Afghanistan, déboussolent l’armée et entraînent la mort de militaires », accuse Fabre-Bernadac (il tient un décompte précis des militaires tués, près de 70 000 depuis 1945, dans les quatre conflits cités). L’homme déplore que « lorsque Macron traite de la guerre d’Algérie, il parle d’un côté des harkis, de l’autre du FLN, mais jamais des soldats français alors que plus de 23 000 d’entre eux y perdirent la vie ». Procès d’intention, car, dans sa commémoration des accords d’Evian, l’Élysée prévoit bien un hommage aux militaires. Autre cible de ces marcheurs… au pas, « le wokisme, la cancel culture » : « Eux, c’est le délitement, la déconstruction, nous, nous voulons reconstruire, que les Français soient fiers de leur grande nation. » Cette marche patriotique ou cocardière voire nationaliste — selon les points de vue — aura (presque) tout d’un défilé militaire… sans soldats d’active. « Je ne les appelle pas dans la rue, je ne suis pas un putschiste ! » jure l’ex-frontiste. Les militaires pensionnés, sans uniforme mais avec médailles, bérets, calots et drapeaux, marcheront devant, « en colonne et en silence ». Ils seront accompagnés de blessés et femmes de militaires tués, suivis des enfants de harkis. Viendront ensuite les civils qui pourront porter des drapeaux français ou régionaux mais pas de pancartes politiques. « La marche se veut apolitique », insiste Jean-Pierre Fabre-Bernadac, qui assure avoir repoussé les avances « de l’entourage d’Éric Zemmour, de Marine (sic) et même de partisans de Valérie Pécresse ». Plusieurs généraux « 2e section » devraient participer, dont le général de Richoufftz, ancien aide de camp du Premier ministre socialiste Pierre Mauroy passé très, très à droite. Des associations d’anciens paras, légionnaires, pompiers, ainsi que la fédération des Opex de France (opérations extérieures) annoncent qu’elles seront de la partie. Nouvelles sanctions à prévoir ? Interrogé, le ministère des Armées se refuse à tout commentaire sur une manifestation « qui fera peut-être pschitt dans le contexte grave de la guerre en Ukraine, ne rassemblant que quelques galonnés aux idées nauséabondes et qui s’emm… à la retraite ». Fabre-Bernadac, lui, mise sur un effet analogue « aux convois de la liberté » et escompte que « la manif fera parler dans les popotes, les mess et les bivouacs », rappelant le buzz politico-médiatique de sa tribune aux 27 000 signataires. Reste que l’initiative des soldats en retraite n’avait pas entraîné d’effet chez ceux d’active.